Objets animés

De l’objet à la “chose ” animée : le désenchantement de l’objet

par Dominique Allard

Cet article propose d’interroger l’objet animé à la lumière des études récentes de la « Thing Theory ». Au contraire d’une relation unidirectionnelle entre le sujet et l’objet animé (où les fantasmes de l’humain attribuent une âme à l’objet), les théories sur la « chose » privilégient les rapports dialogiques entre l’objet et celui qui le perçoit. C’est également la primauté de l’objet quotidien dans les pratiques artistiques actuelles qui représente un intérêt particulier. L’auteure propose ainsi de repenser un objet récurrent de ces pratiques, la chaise, dans son passage de l’objet à la « chose » animée.

Le retour des objets-fétiches et quelques façons d’y parer

par Jean-Philippe Uzel

On assiste depuis le milieu des années 2000, dans la mouvance de l’art néopop (Jeff Koons, Takashi Murakami, Damien Hirst), au retour des fétiches de la marchandise. Les œuvres de ce courant trouvent une légitimité théorique chez certains auteurs, comme W.J.T. Mitchell, qui relisent le célèbre texte de Marx sur « Le caractère fétiche de la marchandise et son secret » au premier degré, c’est-à-dire dénué de toute dimension critique. À l’encontre de cette lecture fétichiste des objets d’art, l’auteur examine les pratiques actuelles de Cooke-Sasseville, Zoe Leonard et Mathieu Beauséjour, qui ont la particularité d’animer les fétiches (en utilisant des matières précieuses ou des billets de banque) tout en critiquant ou en bloquant leur pouvoir de fascination.

Des rêves “de hijacks et d’accidents d’oiseaux ”. Les objets cultes de Camille Henrot

par Vanessa Morriset

Et si notre rapport au monde n’avait cessé d’être archaïque ? Depuis les Lumières, la culture occidentale a dévalorisé l’irrationnel au profit des explications scientifiques et des avancées technologiques. Mais, périodiquement, avec le doute quant à leur réussite ressurgit le sentiment d’un fond de sauvagerie demeuré intact en chacun de nous. Les œuvres de Camille Henrot – objets achetés dans la rue, sculptures d’inspiration africaine ou océanienne, vidéos tournées en Égypte ou au large de Vanuatu – explorent le primitivisme de notre relation au monde à travers l’ambigüité de notre désir d’exotisme et son envers, le culte de la technologie.

Leçon de choses : au sujet de Learning about cars and chocolates de David Askevold

par Emily Rosamond

La vidéo de 22 minutes de David Askevold, Learning About Cars and Chocolates (1972), soulève une volée de questions épistémologiques concernant la façon dont nous vivons avec les biens de consommation autant que par leur intermédiaire, et apprenons à les connaître. L’article est une analyse détaillée de la façon dont quelques-unes de ces questions se déploient dans la vidéo.

L’automate et son nombre

par Patrick Poulin

L’objet s’anime non pas face au virtuel, mais selon celui-ci ; dans le processus, il se replie sur le sujet dans l’annulation de leur rapport. Il faut désormais prendre acte de cet événement pour penser l’objet en art actuel. Il est ainsi question d’une représentation de l’objet qui fait appel au codage numérique dans des pratiques artistiques non numériques, d’un animisme de la machine-automate et de l’absence qui laisse l’objet à l’état de ruine.

Thomas Hirschhorn : sur l’hyperconsommation et la résistance

par Mickael Dirisio

Cet article aborde la critique contemporaine de la consommation effectuée par Thomas Hirschhorn, en décrivant le passage de son champ de réflexion de la consommation à l’hyperconsommation, à travers l’examen de deux de ses œuvres récentes, Das Auge (L’œil) et Crystal of Resistance. Dans ces installations, Hirschhorn va au-delà de la critique traditionnelle de la consommation, qui se limite souvent aux objets inanimés, pour adopter un point de vue plus vaste qui englobe les corps vivants, et s’intéresse aux systèmes sociaux qui définissent la société contemporaine du point de vue des crises et de la précarité socioéconomique. Concernant ces systèmes, des modes de résistance possibles sont considérés, notamment différents réseaux comme Internet et des interventions sociales telles que l’action collective.

Theaster Gates : une architecture en attente d’utilisation

par Jesi Khadivi

Le présent article s’intéresse aux récentes expositions de Theaster Gates à la galerie Kavi Gupta, à Chicago, et au Museum of Contemporary Art, à Los Angeles, pour dégager les implications de l’approche de l’artiste, selon laquelle il aborde les histoires et les institutions comme autant de structures prêtes à l’emploi. L’auteure examine comment, en incarnant les rôles médiateurs de maître de cérémonie et de prédicateur, Gates tisse des réseaux relationnels entre communautés et pratiques artistiques.

Contours

par Emily Labarge

Dans une nouvelle série de dessins produite durant une résidence de six mois à Londres, l’artiste outaouaise Josée Dubeau porte un regard incisif sur sa pratique artistique. À travers des œuvres soignées, précises et souvent délicates, elle commente vertement notre rapport aux structures et aux systèmes, petits et grands, physiques et conceptuels, organiques et non organiques. Les thèmes dominants de sa pratique sont le temps et l’espace, ainsi que les phénomènes concomitants liés à la durée et au corps que l’auteure retrace ici, depuis les premières installations de l’artiste jusqu’à un dessin à la craie réalisé à grande échelle devant la Tate Modern, interrompu par les autorités en cours d’exécution.

Partager sa “petite affaire privée ”. Claire Savoie et Cristina Nuñez

par Céline Huyghebaert

Dans cet essai, Céline Huyghebaert analyse le sens de l’intime dans les expositions de la Québécoise Claire Savoie et de l’Espagnole Cristina Nuñez qui ont été présentées pendant la 12e édition du Mois de la Photo à Montréal. Dans ces deux récits photographiques et vidéographiques qui jouent avec les codes du récit de confession, les matériaux privés ne sont pas les « médiocres » vestiges d’une vie particulière avide d’être fouillée, comme le dénonçait Deleuze en parlant des œuvres qui se construisent à partir des « petites affaires privées ». Ils sont assemblés dans une structure esthétique, afin de hisser les éléments personnels, soit dans leur banalité la plus grande, soit dans leur puissance dramatique, à un rang collectif.

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