La route érotique en abécédaire

Clément Sanna est un jeune photographe et designer français basé à Lyon. Inconditionnel du Polaroïd et de la photo argentique, son travail fait tomber nos repères habituels – qu’ils soient temporels, spatiaux ou esthétiques –, créant une imagerie subtile qui donne une douceur et une profondeur inédites aux choses. Il fallait une telle subtilité pour traiter du sujet exigeant de la route érotique.

Il y a les mots de la sexualité comme il y a les mots de la route. Et souvent, ils se croisent, se recoupent, marquant ainsi le lien symbolique et fonctionnel fort qui unit ces deux univers. Petit florilège, où l’on apprend que les voitures autonomes risquent de modifier en profondeur nos comportements sexuels, et que la diligence de Lyon n’est pas qu’un transport en commun.

Une brusque accélération, un éclair de lumière. Puis le choc violent du métal heurtant un autre métal, les débris de verre entrant dans la chair, les organes broyés par la mécanique torturée. Et, soudain, la jouissance, immense et intenable. Bienvenue dans le monde des excités du crash.

L’explosion contestatrice que véhicula la contre-culture hippie opposait au système un mode de société alternatif basé sur le communautarisme, le pacifisme, le refus de l’autorité, la liberté sexuelle, les droits des minorités, un nomadisme relatif, l’évasion par les drogues, la spiritualité, la Route, la musique… Des années 1960 à 1975, des milliers d’enfants-fleurs quittèrent l’Occident, provisoirement le plus souvent, définitivement parfois, et cheminèrent sur les routes vers l’Asie.

Au cinéma comme en littérature, il y a les oeuvres dont l’érotisme est évident, direct et impudique. Il y a celles qui empruntent des chemins détournés, et dont on ne sait pas trop pourquoi elles nous émoustillent. Et puis, il y a celles étranges, tordues, presque malsaines dont on ressort soi-même étonné des sensations qu’elles provoquent. Boulevard de la mort (Death proof, en anglais) est tout cela à la fois.

La route est un lieu de drague, qui ne l’a jamais expérimenté ? Mais si le code de la route est (généralement) partagé par tous, ceux du flirt le sont moins, surtout lorsque des différences socio-culturelles s’en mêlent. Alors, au carrefour, le quadra vieille Europe cèdera-t-il aux avances directes de la jeune étatsunienne ?

On connait Gay Talese, figure du nouveau journalisme américain et de la « non-fiction », qui se fit remarquer notamment par ses enquêtes sur la toux de Franck Sinatra, la mafia new-yorkaise ou la sexualité des Américains. Dans Le Motel du Voyeur sorti l’automne dernier, il nous raconte sa rencontre, présentée comme réelle ( ?), avec un propriétaire de motel voyeur, Gérald Foos, qui, durant de nombreuses années, a espionné ses clients, caché dans le grenier de son établissement, consignant ses observations dans un journal.

Dans une scène de la comédie culte US Fast times at Ridgemont High (1982), un tout jeune Sean Penn en skater ébouriffé porte le modèle slip-on à damier noir et blanc de Vans. La marque fétiche des skaters et des adeptes de sport extrême est devenue, en 50 ans, un signe de reconnaissance et une icône de la mode. Sur la route de la gloire, ce cameo a été décisif.

Ephémère, mais légendaire épreuve routière des années 50, ressuscitée depuis trente ans, la Carrera Panamericana est un des grands mythes du sport automobile, dont le nom a fait rêver plus d’un amoureux de belles mécaniques.

En explorant l’imaginaire qui unit en un même berceau culturel musiques, villes et routes américaines, la websérie Music on the Road a capté les sonorités nouvelles, nées de l’alchimie entre un héritage abondant et une réappropriation des styles et des codes. A travers les récits d’artistes qui ne se laissent pas enfermer dans les stéréotypes, Music on the Road donne à voir et entendre un paysage artistique en perpétuel mouvement.

Le nomadisme, c’est la liberté. Et peut-être le futur. A l’ère de la technologie toute-puissante, les nomades digitaux réalisent l’utopie d’une vie en mouvement et construisent une nouvelle société.

Sur la route qui longe le parc national de Joshua Tree dans le haut désert californien, trois petites villes se succèdent et accueillent les roadtrippers. Yucca Valley, Joshua Tree et finalement 29 Palms. Cette dernière, qui accueille une garnison militaire, est aussi l’une des portes d’entrée dans le parc et l’adresse d’un hôtel où l’on ne cesse de vouloir retourner.

Un road trip urbain

Les cheveux gominés et le rock’n’roll à fond, ils parcourent les routes au volant de voitures américaines des années 50 complètement transformées. Ce sont les Crazy Cruisers, l’un des cars club les plus fameux de la scène Kustom européenne. Oui, Kustom avec un grand K, comme l’écrivait George Barris, un père spirituel pour ces férus de tuning oldstyle américain – Barris qui fut, entre autres, le concepteur de la Batmobile, et personnalisa des voitures pour Elvis Presley, John Wayne et Dean Martin.

Tout lâcher sur un coup de tête pour suivre un vieux rêve… Certains y pensent, Fadi Boukaram l’a fait. Il parcourt désormais en camping-car tous les Etats-Unis à la poursuite des « Lebanon », ces villes américaines qui portent le nom de son pays d’origine. Sur la route, son projet a subtilement changé de but : de road trip obsessionnel mais désinvolte, il est devenu une véritable aventure humaine. Rencontre avec un voyageur hors-norme en quête de vérité.

En 2015 ( selon le site Statista.com ), 80% des Français ont choisi la voiture pour partir en vacances et se rendre sur leurs lieux de villégiature. Parmi eux, il y avait certainement quelques lecteurs potentiels de Roaditude ou autres amoureux de l’asphalte, qui roulaient pour le plaisir de rouler et pour qui l’important n’était pas tant la destination que le voyage lui-même. Mais, à côté de ces goudronautes passionnés, combien d’enfants, de conjoints, de passagers se sont ennuyés à mourir pendant le trajet ? Voici quelques conseils pour les petits ou les grands adeptes du « C’est encore loin ? » et du « C’est quand qu’on arrive ? ».

Fiction