Clovis fait partie des grandes figures de l’histoire de France. Pourtant, celui que Charles de Gaulle plaçait au commencement de l’histoire nationale est aujourd’hui considéré avec suspicion, en raison même de son succès passé et des multiples récupérations politiques et religieuses dont il a fait l’objet à travers les siècles. De lui, on ne connaît souvent que le baptême et le mariage avec Clotilde. C’est bien peu. Au-delà de l’image d’Épinal, le premier roi franc de Gaule présente pourtant un réel intérêt historique. À l’occasion du 1 500e anniversaire de sa mort, le 27 novembre, Religions & Histoire propose une réflexion générale autour de cette figure emblématique afin de mieux pénétrer un monde en pleine mutation. La Gaule du Ve siècle est en effet celle de la fin de l’Empire, du début de la dynastie mérovingienne, de la christianisation massive de la société et de l’élaboration d’une royauté chrétienne… Un univers foisonnant et injustement oublié.
Le baptême de Clovis
Une conversion, un acte politique, une instrumentalisation
Le baptême de Clovis
Tous les historiens s’accordent pour considérer que le baptême de Clovis, premier baptême d’un roi barbare conforme à l’orthodoxie fixée par le concile de Nicée de 325, est un événement majeur de l’histoire de l’Occident post-romain. Mais, sans parler de sources périphériques qui aideraient à saisir son environnement géopolitique et religieux, celui-ci n’est connu que par trois textes, écrits entre la période contemporaine des faits et près d’un siècle plus tard, dont les informations se trouvent parfois en contradiction les unes avec les autres, en particulier quant aux circonstances et à la datation de la cérémonie.
Le baptême de Clovis dans l’historiographie (IXe-XIIe siècle)
Le baptême de Clovis n’a pas d’emblée été considéré comme un événement fondateur de la monarchie franque. C’est par la volonté d’un homme, Hincmar, archevêque de Reims au IXe siècle, qu’il prend une allure providentielle et contractuelle. Dès lors, le baptême du premier roi franc chrétien et bientôt son sacre font l’objet d’interprétations et de diverses réécritures au service de l’Église de Reims puis des rois capétiens.
La Gaule, du paganisme au christianisme
Bien que difficile à établir précisément, la date du baptême de Clovis, au tournant des Ve et VIe siècles, est généralement présentée comme le point de départ de la christianisation du royaume des Francs. L’événement a suscité d’innombrables interprétations contradictoires, particulièrement à l’occasion des commémorations de 1896 et de 1996 qui reflétaient en fait surtout les débats contemporains sur la place et le rôle du catholicisme en France. Ces débats furent assurément excessifs : s’il n’est pas question de nier l’importance du baptême de Clovis, ne serait-ce qu’en raison du développement d’une légende fondatrice pour l’histoire de la France médiévale et moderne, encore faut-il le replacer dans un temps plus long qui commence dès le IVe siècle avec l’introduction du christianisme en Gaule romaine et se poursuit durant tout le Moyen Âge, voire au-delà, avec les efforts de l’Église pour convertir en profondeur la société.
Croyances de la Gaule mérovingienne. Les leçons de l’histoire et de l’archéologie funéraire
De même que pour les essais de reconstitutions sociales, l’archéologie funéraire a été utilisée de longue date, avec plus ou moins de bonheur, pour l’approche des croyances à l’époque mérovingienne. Ne tenant pas toujours compte du contexte historique, celle-ci s’est le plus souvent traduite par une problématique simpliste, les usages funéraires étant censés refléter tour à tour le paganisme et le christianisme.
Le faste funéraire de Childéric et ses influences orientales
L’un des acquis les plus spectaculaires des fouilles menées de 1983 à 1986 par Raymond Brulet dans l’environnement de la tombe de Childéric à Tournai, près de l’église Saint-Brice, a été de démontrer qu’elle avait été surmontée par un vaste tumulus de 20 à 40 m de diamètre, à l’instar des grandes tombes dites « royales » scandinaves, anglosaxonnes et danubiennes.
La tombe de Clovis
Grâce aux Dix livres d’histoire de Grégoire de Tours (IV, 1), nous savons que Clovis, décédé en novembre 511, fut inhumé dans le sacrarium de la basilique des Saints-Apôtres de Paris (future abbatiale Sainte-Geneviève), là où furent enterrés par la suite ses petits-fils, Theudoald et Gontaire, fils de Clodomir, assassinés vers 524 par leurs oncles Clotaire et Childebert, sa fille Clotilde (épouse du roi wisigoth Amalaric), décédée en 531, et finalement son épouse Clotilde, morte vers 544. Après eux, la famille royale mérovingienne ne devait plus utiliser cette basilique pour ses sépultures.
À la recherche du baptistère de Clovis. Les fouilles de la cathédrale de Reims
Si Grégoire de Tours, dans ses Dix livres d’histoire, indique que Clovis reçut le baptême des mains de l’évêque Remi de Reims, il ne précise pas où se déroula la cérémonie. Néanmoins, par déduction logique, l’historiographie admet que ce fut vraisemblablement au siège de l’évêque, c’est-à-dire Reims.
Topographie chrétienne de la Gaule. (fin du IVe - début du VIe siècle)
La topographie chrétienne est un concept de chercheurs. Dans l’Antiquité tardive, il ne saurait désigner une réorganisation de l’espace habité en relation avec la nouvelle religion et ses institutions, car la structure de l’espace reste antique. Cependant, une visibilité de la foi nouvelle s’amorce avec la construction de lieux chrétiens, et une relation à l’espace différente s’esquisse dans laquelle la relation à l’au-delà joue un rôle important. Durant le premier tiers du VIe siècle, un seuil paraît franchi, et les fondations se multiplient grâce à l’action des évêques et l’appui des laïcs. Ce mouvement se traduit par de nouvelles constructions ou par des reconstructions d’édifices anciens qui, peu à peu, désorganisent le parcellaire antérieur.
Construire une royauté chrétienne
Au IVe siècle, les empereurs Constantin puis Théodose favorisent le christianisme au point d’en faire la religion officielle de l’Empire romain. Peu à peu se met en place une institution ecclésiastique dont la tête est l’empereur. Dans la Gaule du Ve siècle, les aristocrates gallo-romains jouent un rôle majeur dans la promotion de la nouvelle religion : ils occupent les postes d’évêques, soutiennent les monastères, fondent des églises. Clovis, nouveau Constantin, et l’aristocratie franque vont s’inspirer de ce modèle pour construire une royauté chrétienne.
L’interdit alimentaire du porc
Présents dès le paléolithique au Proche-Orient, le sanglier et le porc sauvage étaient chassés et consommés par les populations. Puis le porc fut domestiqué, entre le VIIe et le VIe millénaire. Mais peu à peu, les religions se mirent à prohiber sa consommation.
Pandore, la première femme de la mythologie grecque
Au début du monde, d’après les mythes grecs, il n’y avait pas de femmes. C’était le temps de l’âge d’or, un temps béni où les hommes partageaient la vie des dieux dans une totale insouciance. Mais l’orgueil du titan Prométhée déclencha la colère de Zeus, qui en représailles punit les hommes en leur faisant un cadeau empoisonné : la première femme, Pandore, qui allait faire basculer le destin de l’humanité.
Des dieux et des hommes. La religion dans les épopées homériques
«Chante, déesse». C’est ainsi que commencent les deux plus anciens poèmes de la littérature occidentale, l’Iliade et l’Odyssée. Deux épopées, l’une narrant la colère d’Achille, l’autre les errances d’Ulysse, qui se placent d’emblée dans la sphère du sacré et du divin. On sait que la place des dieux est essentielle dans le texte homérique ; ce sont eux qui président au destin des mortels, qui les assistent, ou non, dans leurs actions. Mais qu’en est-il de la place de la religion, c’est-à-dire du rapport intime et cultuel que les hommes entretiennent avec la divinité? Sur ce point, l’Iliade et l’Odyssée présentent un certain nombre de paradoxes qui nous poussent à nous poser cette question: les héros d’Homère ont-ils cru à leurs dieux?
Sur les traces du Ramayana. Au cœur de la spiritualité indienne
L’histoire de Rama fait partie du patrimoine spirituel universel. Toujours vivace en Inde, le mythe a inspiré à compter du XVIe siècle les artistes et donné naissance à un corpus iconographique gigantesque. À l’occasion de la parution d’un livre sans égal sur le sujet, revenons sur les traces du prince légendaire et remontons le fil d’une aventure éditoriale fabuleuse.
Chromace d’Aquilée (335-408)
«À l’égal de tes concitoyens, nous connaissons, en dépit de la distance, ta vive et ardente charité, ton parler décidé, franc et hardi, ta fermeté semblable au diamant», écrivait en 406 Jean Chrysostome à l’évêque d’Aquilée. Chromace est un Père de l’Église dont le patrimoine littéraire a connu un sort original : son oeuvre, disséminée à travers manuscrits et lectionnaires médiévaux, n’est réapparue qu’au cours de la seconde moitié du XXe siècle, grâce aux découvertes des savants français Raymond Étaix et Joseph Lemarié qui en ont édité la majeure partie au cours des années 1960-1980.