Ce numéro de la revue ESPACE art actuel a pour thème « Monuments/contre-monuments ». L’idée du monument n’est pas récente. Elle émerge avec la conscience de l’histoire. Selon l’étymologie latine, monumentum signifie « ce qui rappelle le souvenir », le monument a donc valeur de commémoration. Par sa présence, le monument sollicite notre attention quant à ce qui a été et, de ce fait, devrait nous sensibiliser à l’avenir.
Monuments / Contre-monuments
Art, mémoire et vérité
Dialogues sur l’identité nationale : mémoriaux récents dans des capitales démocratiques
Apparu dans les années 1980, en Allemagne de l’Ouest, le concept de Gegendenkmal (contre-monument) décrit les démarches artistiques qui sont critiques à l’égard de l’épineuse histoire de ce pays et de la persistance de ses monuments impériaux et national-socialistes. Karen Franck, Ruth Fazakerley et moi-même avons proposé l’expression de « mémorial dialogique » pour des cas où les formes et les significations commémoratives sont délibérément placées en juxtaposition spatiale avec d’autres déjà existantes.
Soft Power ou les corps-monuments d’Alexandra Pirici
En 2014, dans le cadre de la Manifesta 10, Alexandra Pirici présentait Soft Power. Sculptural additions to Petersburg monuments. Cette performance mettait en relation des performeurs avec trois monuments de Saint-Pétersbourg, respectivement érigés en hommage à Pierre le Grand, à Catherine II de Russie et à Lénine. Les performeurs intervenaient en demeurant essentiellement immobiles ou en bougeant peu, vacant à de simples occupations. Ils sont intervenus six fois en tout: trois avec le monument Pierre le Grand, deux avec Lénine et une avec Catherine II.
Au-delà du devoir de mémoire : la Galerie Kai Dikhas comme contre-monument rom
Le mandat de la Galerie Kai Dikhas de Berlin est de présenter des œuvres d’artistes contemporains roms d’Europe. En langue romani, Kai Dikhas signifie « l’endroit où l’on voit », mettant en relief l’objectif de la galerie de rendre visible, auprès d’un plus grand public, le travail artistique des Roms.
“Je veux me battre”. Thomas Hirschhorn et le monument comme dialogue
Dans l’une de ses nombreuses déclarations à propos de ses projets artistiques, l’artiste suisse Thomas Hirschhorn écrit : « Ma critique du monument vient du fait que l’idée du monument nous est imposée d’en haut ». Hirschhorn critique les valeurs soutenues par les monuments publics traditionnels, les décrivant comme des incitations à admirer l’idéologie dominante. « Je veux me battre contre la hiérarchie, la démagogie, cette source de pouvoir », insiste Hirschhorn dès lors qu’il commence à imaginer un nouveau modèle d’espace monumental.
L’immersion au service de la mémoire
Le Mémorial de l’abolition de l’esclavage de Nantes, inauguré en 2012, est l’oeuvre de l’artiste Krzysztof Wodiczko et de l’architecte Julian Bonder. Installé sur les quais de la ville, le monument commémoratif est composé de trois parties. La première consiste en une promenade végétalisée de 7000 m2 le long des berges de la ville.
Protocoles optiques
Mon premier souvenir relié à l’écriture remonte aux années d’école primaire. Un des exercices d’apprentissage consistait à paraphraser un texte. Un de ces textes décrivait le quotidien du jeune Lénine à une époque où il avait le même âge que nous. Le texte faisait l’éloge de l’enfant responsable et ordonné qu’il était. Je ne me rappelle plus très bien les détails, mais ce qui demeure présent dans mon souvenir, c’est ma description : la transposition de l’ordre régnant sur mon bureau sur celui de Lénine.
Monument aux victime du communisme : chronique d’un coup politique
Les élections fédérales à peine terminées, le moment est propice au bilan de l’héritage culturel légué par le gouvernement conservateur au pouvoir durant près d’une décennie au Canada. Dans la capitale nationale, à Ottawa, plusieurs monuments ont vu le jour depuis 2006 (Monument de la guerre de 1812, Monument aux pompiers canadiens, Hommage aux animaux en temps de guerre, Monument de la Marine royale canadienne) tandis que d’autres sont en cours de préparation.
Céleste Boursier-Mougenot, acquaalta : l’invitation au voyage
Connu pour son utilisation de dispositifs sonores et vidéos, Céleste Boursier-Mougenot a, pour son exposition au Palais de Tokyo, inondé le rez-de-chaussée du bâtiment. L’installation intitulée acquaalta, en référence aux inondations qui submergent, à l’automne, les rues de Venise, est composée d’un canal d’eau, de barques et d’un dispositif audio et vidéo.
Lieven de Boeck : pour une solidarité esthétique
Deux propositions formelles radicalement différentes forment l’exposition Let us be us, again and again, and always de Lieven de Boeck présentée, cet été, à la Fonderie Darling. L’artiste belge, qui expose ses œuvres pour la première fois en Amérique du Nord, provoque une rencontre entre deux installations sous le thème de l’identité géopolitique.
Pascale Marthine Tayou : Boomerang
La dernière apparition de Pascale Marthine Tayou, au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, remonte à la performance PIC NIC Afrosisiaque...aphrodisiaque...afrozidiaque, présentée dans le cadre de l’exposition Transferts en 2003. Depuis lors, l’artiste n’a cessé de faire évoluer son œuvre protéiforme et il continue de poser un regard critique sur le monde et les individus qui l’habitent.
Jocelyn Robert. L’art par la disparition
Dans le cadre de l’événement Voyage à Nantes, en collaboration avec Manif d’Art, neuf artistes de Québec ont été invités à présenter leur travail. Parmi eux figurait Jocelyn Robert qui a présenté le projet Interférences dans quatre lieux de la ville. L’idée de ce projet reposait sur la mise à disposition, pour l’artiste, des œuvres de la collection du Musée des Beaux-arts de Nantes, une collection considérable dans laquelle l’artiste a investigué pendant plusieurs mois.
Paul Wong: Our Personal Universes
In the era of art-as-research, it is perhaps a commonplace that if you want to know what happens when you push a technology to its limit, hand it to some artists and watch what happens. In his affinity for the late-model iPhone—its camera and its photo and video apps—Vancouver video artist Paul Wong exemplifies this kind of research.
Samuel Roy-Bois : La pyramide
Pour célébrer ses 30 ans, l’Œil de Poisson ouvrait, en septembre dernier, la saison culturelle 2015-2016 avec La pyramide, une exposition de Samuel Roy-Bois. Sensible aux formes de l’architecture, aux espaces construits et aux manières dont ils témoignent de notre relation au monde, Roy-Bois a construit une structure architecturale monumen- tale à large déploiement, conçue à partir d’une méthode d’invitation pyramidale lancée entre les membres de la communauté artistique.
Camille Henrot. The Pale Fox
Le renard pâle, qui donne son nom à l’exposition, est un pseudonyme pour « Ogo », personnage essentiel de la mythologie Dogon, racontée par Germaine Dieterlen et Marcel Griaule dans leur célèbre et polémique ouvrage Le Renard Pâle (1965). Dans ce récit constitué par les anthropo- logues français, Amma (le dieu créateur) élabore un premier monde qu’il détruit aussitôt, insatisfait du trop plein désordonné qui y règne.
Martin Boisseau. Sixième traitement : dessins saturés et précarités formelles
Martin Boisseau récidive avec une exposition qui explore à nouveau les limites entre les médiums et le caractère obligé du sens qui est mis en œuvre selon les modalités propres de chacun. Ce sont, encore une fois, et plus expressément, dessin et sculpture qui font les frais de cette exploration.
Clément de Gaulejac et le retour des héros
Imaginons un instant être avalés par une baleine comme le brave Jonas dans la légende. À l’intérieur, il ferait nuit, tout aurait l’aspect de silhouette, et l’avenir, lui, serait incertain. Notre œil s’ajusterait progressivement à une variante de la pénombre jusqu’à ce qu’un tison se ravive dans le ventre de la bête, laissant apercevoir un à un les fragments ingurgités.
Geneviève Cadieux, rentrée intime
C’est dans le musée d’art flambant neuf de Joliette, aux espaces léchés et intimes, que se déploie l’exposition consacrée à Geneviève Cadieux proposée par le commissaire Vincent Bonin. Après une première étape en Nouvelle-Écosse, entre le musée d’art de l’Université Mount Saint Vincent et la Dalhousie Art Gallery, cette traversée d’une trentaine d’années de production explore la face abstraite des travaux de l’artiste.
Patrick Bernatchez : l’odyssée post-apocalyptique
Avec l’exposition Les temps inachevés, présentée au Musée d’art contemporain de Montréal, Patrick Bernatchez réitère une pratique pluridisciplinaire dont l’esthétique minimaliste s’articule à travers deux cycles d’œuvres significatives : Chrysalides (2006-2013) et Lost in Time (2009-2014).