Londres

Los Angeles express

by Julien Blanc-Gras

Je suis arrivé à Los Angeles par un vol de jour partant d’Amsterdam. Dit comme ça, ça n’a l’air de rien, mais l’avion traverse tout de même un quart de planète en suivant le soleil. Passées les côtés irlandaises, on délaisse l’humanité pour survoler l’Atlantique, le Groenland, la banquise qui s’effrite, la baie d’Hudson et la forêt boréale canadienne. J’ai passé sept heures collé au hublot, suspendu au monde sans détecter de forme de vie – ni route, ni habitation, ni rien – avant de redescendre vers une mégapole de 18 millions d’habitants. Je suis déjà venu deux fois dans cette ville qui m’a d’abord donné un goût de « n’y reviens jamais », puis j’ai changé d’avis sans trop savoir pourquoi. Ce doit être le charme vénéneux de cette Californie concentrant le pire et le meilleur des États-Unis d’Amérique, avec cette amplitude culturelle – Bukowski et Paris Hilton – qui ne cessera jamais de m’étonner.

Londres / East End - 10 bonnes raisons d’y retourner

by Albéric d’Hardivilliers · illustrations: Matthieu Raffard

Bon, allez, pour une fois on laisse de côté Oxford Street, Hyde Park, la Tamise, Big Ben, bref, tout ce qui fait de Londres une très belle carte postale. On oublie aussi Mayfair, Camden Town, Harrod’s et hop, on file à l’est, direction l’East End. Longtemps synonyme de pauvreté et de criminalité (les Londoniens se souviennent encore en tremblant de la triste célébrité qu’y acquit Jack l’Éventreur en 1888), le quartier est maintenant connu depuis plus de dix ans sous le petit nom de Little India. Si vous cherchiez, en venant à Londres, à vous offrir un curry, faites-nous confiance, descendez à Aldgate East, prenez à l’est sur quelques centaines de mètres et remontez Brick Lane … vous n’aurez que l’embarras du choix. Et ça tombe bien, car c’est là que commence notre petit périple.

Colorado - Rocky Mountain National Park

À l’automne 1873, l’exploratrice britannique Isabella Lucy Bird chevaucha les Rocheuses du Colorado. De cette expédition, elle tira son livre le plus populaire Une Anglaise au Far West (A Lady’s Life in the Rocky Mountains) dans lequel elle convenait que ces montagnes n’étaient faites ni pour les touristes ni pour les dames. Comme elle se gourait ! De nos jours, le Rocky Mountain National Park accueille plus de 3 millions de visiteurs chaque année dont une bonne proportion, semble-t-il, ne possède aucuns attributs virils.

Maylis de Kerangal - Tangente vers l’est

by Michel Fonovich · illustrations: Hélie Gallimard

Maylis de Kerangal a construit toute seule un pont et une ville quelque part en Amérique mais ça pourrait être ailleurs. La geste s’appelle Naissance d’un pont. Maylis de Kerangal a pris le train pour voguer sur un océan : la Sibérie. Elle en a rapporté une aventure géographique et sensorielle : Tangente vers l’Est. Embarquement immédiat pour le voyage et prière d’attacher sa ceinture car son écriture est du genre qui palpite, qui charrie, qui résonne

Antarctique - On dirait le sud

by Christophe Migeon · illustrations: Christophe Migeon

« Seigneur, quel voyage ! La sécurité, les contrôles, les heures de vol… J’en ai ras-le-bol » s’exclame une rombière en sortant de l’aéroport d’Ushuaia. L’envie est forte de lui répondre qu’il y a encore moins d’un siècle, il fallait bien deux ou trois mois depuis l’Europe pour rallier le Grand Sud et que nul n’était bien certain de revenir d’un périple aussi hasardeux. Oubliés les trois-mâts aux ponts grinçants, les goélettes aux haubans saupoudrés de givre, oubliés les interminables hivernages coincés dans les glaces où l’on finit par manger les chiens de traineau et mâchonner le cuir de sa ceinture faute de mieux, l’aventure antarctique se tente désormais dans le luxe et le confort douillet de grands yachts avec décoration intérieure dernier chic, boutiques et restaurants gastronomiques. Et après tout, ce n’est pas plus mal.

Israël - Du désert de Néguev à la Mer morte

by Christophe Migeon · illustrations: Christophe Migeon

La voici donc la Terre promise, ce pays tant convoité où le lait et le miel coulent d’abondance. Difficile de fouler cette partie du monde sans ruminer les a priori, les idées toutes faites, les problématiques, les vérités distillées depuis plus d’un demi-siècle par le prolifique alambic de l’actualité. Le voyage est là pour récurer à neuf les méninges oxydées par la rouille médiatique. Dans le Néguev, la litanie des cailloux qui blanchissent comme des traînées d’ossements, le règne sans partage d’une minéralité absolue, le cahot lancinant de la piste écorchée et galeuse, finissent par effacer des mémoires les uniformes de Tsahal, les check-points engorgés, les murs honteux, les alertes à la bombe ou les gamins lanceurs de caillasses. Ou disons que la pérégrination dans le désert estompe plutôt qu’elle n’efface, un peu à la manière du vent chargé de sable qui ponce et émousse une gravure rupestre : les creux sont toujours là mais il faut passer le doigt dessus pour bien les visualiser.

Les Marquises - Belles Îles en mer

Dans le port de Papeete, les valises sont alignées sur le quai. Étiquetées, elles vont bientôt rejoindre les cabines des passagers. Les familles des marins agitent les mains pour un dernier au revoir tandis que l’Aranui 3 lève l’ancre au son d’une bruyante corne de brume. Après plus d’une vingtaine d’années de service à bord, Tino, un solide Marquisien tatoué comme il se doit, éprouve toujours la même émotion à l’heure du départ. Pour lui, la traversée de 1400 km est toujours trop longue. « Dès que je vois les pics de Ua Pou, je ressens les énergies des Marquises. C’est le retour à l’harmonie, à la nature, aux oiseaux…, au pays des ancêtres. »